Né du syncrétisme du Mahayana et des valeurs du tantrisme hindou, le
Vajrayana est apparu au VIème siècle au Cachemire et au Bengale. Au début
du XIème siècle, il gagne l’ensemble de la zone himalayenne. Les peuples
mongols ne l’adopteront qu’au XVIème siècle.
Prolongement de l’Hinayana et du Mahayana, il propose une nouvelle voie
pour atteindre le salut, basée sur l’étude des textes sacrés, l’utilisation des
mantras (formules rituelles), des mudras (gestes sacrés) et des mandalas.
L’adoption de pratiques issues du tantrisme hindou donne au Vajrayana une
dimension ésotérique qui implique une longue initiation par un maître pour
pouvoir percevoir la « vraie » signification des textes.
Les originalités du Vajra
A l’origine, Vajra était "l’épouse foudre-diamant" du dieu
hindou Indra. Avec cette arme-femme, il pourfendait ses
ennemis. Le tantrisme en fit le symbole des pouvoirs
ésotériques et magiques permettant l’accès au nirvana. Le
" Diamant ", Dorje en tibétain, représente ce qui est pur et
indestructible malgré le temps qui passe: la réalité ultime,
la vacuité universelle.
Les textes sacrés du Tantrisme
Les " tantra " regroupent soixante quatre textes fondamentaux. Ils ont été rédigés
entre le VIIème et le XIIIème siècle par des ordres mahayanistes qui introduisirent
dans le culte bouddhique des croyances populaires. Ces traités de pratiques rituelles
et yogiques ou ésotériques sont rassemblés en quatre grandes catégories : les Kriya
Tantra, décrivant le rituel des cérémonies ; les Charya Tantra, concernant la pratique
quotidienne de la vie religieuse ; les Yoga Tantra, proposant des règles magiques et
mystique et les Anuttarayoga Tantra exposant les secrets du culte de la " Shakhti " ou
énergie féminine.
Ce dernier recueil contient la quintessence du Vajrayana. Il
est divisé en trois volumes : le Maha Yoga où sont décrites
et commentées les unions des êtres avec l'absolu, l'Anu Yoga qui traite des liens entre le
macrocosme et le microcosme et l'Ati Yoga ou " Union extraordinaire " considéré comme le plus
sacré et le plus achevé du message du Bouddha.
La doctrine tantrique bouddhiste, si elle est issue de l'hindouisme, s'en diffère parce que
passée au crible de la vacuité. Elle propose d'atteindre le salut et la délivrance ultimes par la
maîtrise des forces cosmiques de l'univers qui sont en chaque individu, via une démarche
ésotérique et ritualiste. Si dans le système hindou, les dieux ont tous une contrepartie féminine
(Shiva-Parvati), dans le Tantra, l'image de déités en union sexuelle (Yab-Yum) symbolisent
l'union génératrice de vie.
Cela a entrainé une adaptation de la perception que l'on avait des bouddhas et surtout des
bodhisattvas qui furent dotés de caractéristiques prises chez certains de leurs correspondants
hindous : aspect effrayant, multiples bras, colliers de cranes … avec toute une symbolique
associée.
L'univers cosmologique du bouddhisme
L'univers bouddhiste (dès la tradition Hinayana) comprend trois sphères d'existence dans le
cadre du cycle des renaissances du samsara.
La première est le monde du désir ou des sens (kamaloka) : il est lui même constitué de six
mondes, dont les trois derniers correspondent aux renaissances inférieures et les trois
premiers aux renaissances plus fortunées. Les six mondes sont représentés dans l'image de la
roue de la vie : le monde des dieux, le monde des Titans, le monde humain, le monde animal,
le monde des fantômes affamés et le mondes des enfers.
La seconde est le monde de la forme (rupaloka) : Royaume divin où les êtres sont libérés des
désirs du monde du désir, mais restent attachés à des sensations et à des formes plus subtiles.
Enfin, le monde du sans forme (arupaloka) est le royaume divin le plus élevé, où les êtres ont
coupé tout attachement pour les objets des deux autres mondes, mais restent centrés sur le
bonheur procuré par la méditation. Ils n'ont pas de corps, ayant transcendé la forme.
Il y a donc six voies possibles de renaissance.
A l'origine des temps et de l'espace existait un "Bouddha Primordial",
l'Adibouddha, dont le culte, parti du Bengale, se rependît au Népal
puis au Tibet à partir du XIème siècle. Nommé Swayambu (" Celui qui
existe par lui même ") ou Vajradhara, il vit dans un paradis nommé Agnistha Bhuvana, " Terre
de lumière ". Vajradhara ou Swayambunath
De lui émanent les cinq Jina ou Dhyani Bouddha qui conditionnent l'Univers aux cinq points
cardinaux : Akshobhya, associé au bleu et à l'eau, monté sur un éléphant, maître du Paradis de
l'Est ; Amitabha, associé au rouge et au feu, porteur d'un lotus rouge et accompagné d'un
paon, maître du Paradis de l'ouest ; Amoghasiddhi, porteur du double diamant, associé au vert
et à l'air, juché sur un aigle, maître du Paradis du Nord ; Ratnasambhava, associé au jaune et à
la terre, porteur du Joyau de la Connaissance, monté sur un cheval ou un lion, maitre du
Paradis du Sud ; Vairochana, associé au blanc et à l'Ether, porteur de la Roue de la Loi, monté
sur un lion-dragon et maitre du Paradis du Centre.
Chacun est destiné à engendrer de nouveaux Bouddhas humains (Sakyamuni est l'un d'eux). Ils
ont une parèdre (Shakhti), personnification féminine de la sagesse.
De la méditation des cinq Dhyani Bouddha naissent les cinq Dhyani Bodhisattvas: Vajrapani, Vishvapani, Avalokiteshvara,
Padmapani et Ratnapani.
Les déités tantriques
Lorsque Padmasambhava arriva au Tibet au VIIIème siècle, il se trouva face à une
religion à la fois animiste et chamaniste : le bön. Une fois de plus le bouddhisme fit
preuve d'adaptation. Selon la légende, Padmasambhava négocia avec Péhar, la plus
grande déité bön : celui-ci renonçait aux sacrifices d'animaux en échange de " l'égoïsme
du peuple tibétain ". Péhar accepta de protéger le dharma.
Beaucoup de déités ou démons bön furent absorbés dans le
Vajrayana ou tolérés. Les déités " courroucées " (herukas),
plus puissantes que les déités paisibles, ont pour rôle de
transmuter toutes nos peurs et répulsions en sagesse. Elles
ont souvent de multiples bras et des symboles variés
(tambourins, coupes crâniennes, tridents…). Samvara est
l'aspect courroucé du Dhyani Bouddha de l'Est, Akshobhya.
Les herukas ont des épouses courroucées, des dakinis,
représentées les cheveux défaits, avec trois yeux, en train
de danser.
Les bodhisattvas ont eux aussi des émanations terribles :
Yamantaka est l'aspect féroce de Manjushri.
Le troisième œil est celui de la sagesse, la coupe crânienne contient le " sang " de l'ego
vaincu et le drikuk (ou kartika) pourfend les trois poisons de l'esprit : l'ignorance, le désir-
attachement et la colère également figurée par les démons piétinés.
Mantra, mandala, tangka,…
Le lamaisme (autre nom du bouddhisme tantrique) s'est doté d'une riche liturgie : objets
rituels, formules sacrées, gestes et couleurs symboliques répondent à des règles définies
depuis plus de sept siècles.
Le maître va choisir une divinité tutélaire qui correspond au caractère de l'étudiant: le "
yidam ". Le yidam est le " lien sacré de l'esprit " qui rattache le croyant aux dieux, le
fidèle au sangha, l'élève au maître. Il aide l'individu à franchir la carapace des
apparences et à utiliser des forces dynamiques pour comprendre la réalité ultime. L'initié
reçoit un mantra associé à la déité. La répétition de ce mantra va permettre à l'étudiant
d'apprendre à visualiser la déité. Si la déité correspond à une faiblesse du pratiquant, il
va peu à peu la transformer en sagesse incarnée par le " yidam ".
Les objets de culte sont nombreux. Les plus connus sont la
cloche rituelle (rilbu) qui représente le principe féminin passif
de “ Sagesse " et le foudre-diamant (dorje) qui symbolise le
principe masculin actif de " Compassion ". Les fondre en une
seule entité, conduit à la "Connaissance suprême ". Signalons
également le phurbu, poignard rituel qui sert à dompter les
démons ou le Kartika qui tranche les illusions.
Les mantras sont une composante essentielle du lamaisme.
Un mantra (" parole ") est une formule sacrée ésotérique, chargée de vertus magiques, dont la vérité est à découvrir au
delà des apparences. Réciter les formules sacrées allège le karma. L'invocation incantatoire génère un conditionnement
qui se combine avec le mystique de la religion.
C'est plus le nombre de citations qui compte que la manière de le faire, d'où
l'utilisation permanente de moulins à prière ou l'omniprésence des " lungtas "
(" petits chevaux du vent " : le nom vient du petit
cheval imprimé portant les Trois Joyaux), drapeaux
de prières qui permettent au vent de réciter et
d’emporter les prières même en l'absence des
humains.
On trouve également des mantras gravés dans la
roche, le long des chemins ou sur des pierres de
prières entassées en de longs murs : les "mendong".
Parmi les mantras les plus connus figure la célèbre formule " Om Mani Padme Hum " (Om,
salut à Toi Joyau du Lotus) ou " Om Vajra Guru Padme Sidha Hum " (Om salut à Toi
Diamant du Parfait Lotus ", le mantra de Padmasambhava.
En sanskrit, mandala signifie " cercle ". Un mandala est une représentation en deux
dimensions de l'Univers pluridimensionnel. Le mandala sert de support à la
méditation et conduit sur le chemin de la Connaissance : il met en communication
l'intérieur et l'extérieur, le visible et l'invisible, le macrocosme et le microcosme.
Son élaboration nécessite de complexes rituels de purification des lieux et
d'invocations demandant la permission à plusieurs classes d'êtres invisibles de
pouvoir entreprendre sa réalisation. Comme pour les
Tangkas, les couleurs correspondent aux univers respectifs
des cinq Dhyani Bouddhas.
La structure du mandala reflète l'ordre universel. Au centre
se croisent les axes perpendiculaires qui relient le Nord au
Sud et l'Est à l'Ouest (le Nord est à droite). La divinité
principale y figure au milieu, espace carré qui représente le domaine de la divinité. Quatre
portes reliées aux quatre points cardinaux donnent accès au carré central. Celui-ci est
généralement entouré par des cercles s'inscrivant dans un second espace plus large. Toutes les
divinités qui ont une fonction dans la visualisation spatiale concernée et la fonction précise du
mandala, sont représentées dans ces différentes zones. Lorsque la divinité centrale est
remplacée par des figures géométriques, le mandala devient un " yantra " (instrument).
Le Toit du Monde
Le développement du bouddhisme au Tibet
Le bouddhisme ne parvint sur les plateaux du Tibet qu'à la fin IVème siècle. Le Tibet était une
grande puissance régionale. Le roi Songtsen Gampo qui régna de 608 à 650 unifia le pays. Il
épousa deux princesses, l'une chinoise, l'autre népalaise qui, ferventes bouddhistes
convertirent leur époux. Songtsen envoya des lettrés au Cachemire pour étudier les textes
sacrés. L'un d'eux, Sambotha, mit au point à son retour le
système d'écriture tibétaine et traduisit les textes
sanskrits et chinois. Cette première diffusion du
bouddhisme ne toucha que l'aristocratie. Le peuple restait
attaché à la religion Bön.
Il fallut attendre le roi Trisong Detsen pour que le
bouddhisme devienne religion d'état en 779. Il fit venir le
moine indien Padmasambhava, maître dans l'art
d'exorciser les démons, protecteur du dharma…
Padmasambhava est considéré comme le Grand
Patriarche du Vajrayana tibétain. Il créa plusieurs
monastères et fonda l'école Nyingmapa, surnommés les " Bonnets Rouges " en raison
de la couleur de leur coiffe.
Le bouddhisme continua son expansion avec le soutien actif des souverains du Cachemire. En 836, le roi Ralpachen fut
assassiné par son frère Langdharma, adepte de la religiuon bön et farouche adversaire du bouddhisme. Il s'en suivit une
longue période de persécution pour le bouddhisme
La " deuxième diffusion " du bouddhisme commença vers le XIème siècle. Les échanges
avec l'Inde reprirent. De nombreuses écoles virent le jour dont les principales furent
Kadampa, Sakyapa et Kagyupa.
Kadampa (" Ceux qui sont liés par l'enseignement ") fut fondée par Bromston. Elle se
caractérisait par le respect des règles monastiques en privilégiant la retraite, la méditation
et l'étude. Cette école fut profondément réformée au XVème siècle par le maître
Tsongkhapa et devint l'école Gelugpa (" Adeptes de la vertu ") que
l'on appelle les " Bonnets Jaunes ". C'est aujourd'hui la principale
école du Tibet grâce à la médiatisation de son chef spirituel l'actuel
Dalaï Lama considéré comme la réincarnation d'Amitabha.
L'école Sakyapa (" Gens de la Terre Grise ") fut fondée par Khön
Köntchok Gyalpo qui fut formé par plusieurs maitres dont Drogmi.
Ce fut l'école la plus importante du Tibet jusqu'au XVème siècle.
Elle disparut suite à des dissensions internes.
L'école Kagyupa ("Gens de l'Expression Orale") est l'héritière d'une
lignée culturelle qui, depuis le XIème siècle, se transmettait le
savoir ésotérique par l'intermédiaire de grands maitres dont Tilopa, Milarepa et Gampopa. A
partir du XIIème siècle, Kagyupa se divisa à de nombreuses reprises. Seules Karmapa et Drugpa
qui constitue aujourd'hui la religion officielle du Bhoutan, ont conservé une grande importance.
Le dernier chef spirituel de Karmapa (le Gyalwa) est mort en Chine en 1982. Un enfant tibétain
a été reconnu comme le dix-septième Gyalwa… mais avec quelle influence des autorités
chinoises ?
Le Canon Tibétain
C'est entre le VIIème et le Xème siècle que le canon sanscrit fut traduit et permit d'établir une
liturgie religieuse importante. Au XVIème siècle, le canon tibétain trouva sa forme définitive au
travers de deux encyclopédies : le Kangyur (" Traduction de la doctrine sacrée ") et le Tangyur
(" Transmissions des Paroles "), commentaires de tous les textes du Kangyur. Ces deux
encyclopédies, malgré leur taille (le Kangyur contient plus de cent mille pages et pèse plus de
cinq cents kilos), furent complétées par de nombreux textes postérieurs d'essence
philosophique ou historique mais également des Terma (" trésors secrets ") dont le plus connu
est le Bardo Thodol, le Livre des Morts tibétain. Le Bardo Thodol n'est pas un itinéraire pour les
défunts, mais une suite d'instructions données à " celui qui veut dépasser la mort, en
métamorphosant son processus en un acte de libération".
Le Naro Chodrug (" Les Six Lois de Naropa "), autre terma important, constitue une véritable
méthode pour parvenir à la libération : grâce à la maitrise de la chaleur physique favorable à la
recherche spirituelle, le fidèle prend conscience que son corps n'est qu'illusion, visualise ses
rêves au travers d'une déité, traverse la mort en expérimentant la transmigration de l'esprit,
quitte le monde des réincarnations et parvient à entrer dans le domaine de la Perfection où il
connaît enfin l'illumination, la " Claire Lumière ".
Ladakh, Sikkim
La région himalayenne a vécu pendant de nombreux siècles sous la domination des trois
grands états de la région, l'Inde, le Tibet et le Népal. Cependant, le Ladakh et le Sikkim
méritent une attention particulière.
Le Ladakh
Le bouddhisme mahâyânique fut introduit au
Ladakh dès le règne d'Ashoka par des moines
indiens venus du Cachemire. Son expansion fut
favorisée par la protection de l'empire kushan.
L'effondrement de cet empire, au troisième siècle, généra de multiples petits
royaumes qui se refermèrent sur eux mêmes. Le " Grand Ladakh " était
constitué d'une partie du Cachemire, du Pakistan et du Tibet méridional. Il
subit une série de divisions et de réunifications. Il dut également faire face
aux assauts des sultans musulmans du Cachemire à partir du XVème siècle.
Ce furent ensuite les tibéto-mongols de Jushri Khan qui attaquèrent le
Ladakh. Finalement, le pays succomba à l'invasion du Maharadja Gulab Singh
en 1854. Le bouddhisme dut subir des persécutions des autorités hindouistes.
Aujourd’hui, la moitié de la population est bouddhiste (80% au Zanskar).
Le Sikkim
Originellement habité par les Lepchas, une population animiste de l'Assam, l'arrivée de
tibétains qui fuyaient leur pays au XVème siècle introduisit le bouddhisme au Sikkim. Le
royaume s'étendait sur le Sikkim actuel, à des vallées tibétaines, à l'Est du Népal, à la
moitié occidentale du Bhoutan et aux collines du Téraï. L'arrivée successive de vagues de
tibétains repoussa les Lepchas aux frontières du royaume.
Le bouddhisme des " Bonnets Rouges " fut érigé en religion d'état et occupe encore
aujourd'hui une position dominante.
Au XVIIIème siècle, un conflit avec le Bhoutan affaiblit le Sikkim qui perdit une partie de
son territoire. Au XIXème siècle, le Sikkim fut à l'origine de la guerre tibéto-anglaise.
Devenu protectorat britannique, le Sikkim fut " transféré " à l'Inde en 1950.
Le bouddhisme a du faire face à de multiples assauts au cours des derniers siècles, de
l'hindouisme au christianisme en passant par les cultes animistes pratiqués dans les vallées isolées. Aujourd'hui, environ
un quart de la population est bouddhiste bien que le bouddhisme en soit la religion officielle.
L'exception Népalaise
La première pénétration du bouddhisme au Népal date d'Ashoka. Au IXème siècle, les
Newars, habitants des vallées de Kathmandou, Patan et Bhaktapur, déjà convertis à
l'hindouisme ou au bouddhisme mahâyânique adoptèrent le Vajrayana tantrique venu du
Bengale qu'ils " métissèrent " fortement d'hindouisme. Le Nord du Népal de son côté se
convertit au lamaïsme tibétain et le Sud à l'hindouisme.
Ce bouddhisme népalais, syncrétisme hindo-bouddhique unique au monde, eut un
développement corrélé aux Newars. Elite du pays, ils accueillirent aux XIIème et XIIème
siècle les moines et savants chassés par les persécutions musulmanes venues d'Inde. Leur
influence grandit sous la dynastie Malla jusqu'au XVIIIème siècle. L'arrivée au pouvoir des
rois Shah, hindouistes, les mis en semi-disgrâce. Cela ne les empêcha pas de maintenir
vivace le bouddhisme népalais qui prévaut encore aujourd'hui.
Le bouddhisme newari s'appuie sur des textes sacrés
dont le Mahanirvana Sutra (Sermons de la Grande Extinction ") qui attachent une
grande importance aux rites, à l'occultisme, aux représentations des déités et au
yoga. Les différences entre moines et laïcs sont gommées : les premiers peuvent se
marier, avoir des enfants, posséder des biens et résider en dehors du monastère
(vihara), les seconds ont accès aux arcanes et fonctions de la religion. La charge
des moines est souvent héréditaire.
La communauté est guidée par les vajracharya
(" maîtres du Diamant "), moines-prêtres, assistés
par les shakyabhiksku (" moines des Shakya ").
Des shakti hindoues ont été ajoutées au panthéon
newari où elles sont devenues des déesses à part entière, telles que Indrani ou
Brahmani. Les rites d'initiation et les sacrifices d'animaux ont été institutionnalisés
même si de nombreux bouddhistes népalais s'en abstiennent.
En fait la ligne de démarcation entre bouddhisme et hindouisme est très floue. Les
adeptes d'une religion assistent volontiers aux fêtes religieuses de l'autre croyance.
Les habitants du nord du Népal comme ceux des vallées himalayennes pratiquent le
lamaisme tantrique tibétain.
Au Népal, ce sont près d'un million et demi de personnes qui ont la foi bouddhiste .
Le Bhoutan, Royaume du " Dragon Tonnerre "
Le véritable nom du Bhoutan (qui signifie " Extrémité du Tibet ") est Drugyul (" Pays du Dragon ") depuis le XIème siècle.
Ses habitants sont les Drugpa ou " Gens du Dragon ".
Dès le VIIème siècle, le futur Bhoutan dont les habitants étaient de culte animiste, reçut de
nombreux missionnaires bouddhistes. C'est Padmasambhava qui fut, vers 750, le principal
artisan du bouddhisme dans le pays. Il fonda plusieurs monastères et dissimula un certain
nombre de terma que ses successeurs devaient découvrir. Ses enseignements furent à la base
des premières écoles bouddhiques du Bhoutan.
Entre le IXème et le XIIème siècles, les vagues successives de tibétains chassés du Tibet par les
persécutions contre le bouddhisme, apportèrent avec elles d'autres écoles tibétaines.
Finalement, c'est l'école Drugpa qui triompha de toutes les autres au milieu du XIIIème siècle.
Du XIVème à la fin du XVIIème siècle, le Bhoutan connut un véritable âge d'or avec des
échanges très riches avec le Tibet, la Chine et l'Inde. Trois hommes émergèrent et jouirent
d'une notoriété particulière : Drugpa Kunleg, considéré comme la réincarnation de deux grands
maîtres tantriques indiens, très aimé du peuple pour
ses exploits mystiques ; Pema Lingpa, formé à la
doctrine des " Bonnets Rouges " qui donna sa forme
définitive au sangha bhoutanais; Ngawang Namgyel,
un religieux tibétain qui se proclama Zhabdrung ("
Celui devant lequel on se prosterne ") et qui réussit à
vaincre les tibétains lors de plusieurs de leurs
offensives. Ngawang Namgyel unifia le pays et fit de la
doctrine drugpa la seule religion officielle. Il généralisa
la construction de Dzong (monastères fortifiés), créa
un clergé d'état avec à sa tête un chef spirituel, le
Jekhempo, et inventa une hiérarchie de fonctionnaires-
moines chargés d'administrer le pays, sous l'autorité
du Desi, chef temporel de l'état. Le Bhoutan avait donc
dès 1650 un gouvernement qui s'équilibrait entre deux institutions, l'une religieuse, l'autre civile
et qui perdure encore aujourd'hui.
Entre le XVIIIème et le XXème siècle, le Bhoutan connut une histoire mouvementée jusqu'à ce
que Ugyen Wangchuk, ponlop (gouverneur régional) de Tongsa prit le pouvoir avec l'accord des
anglais pour fonder une nouvelle dynastie qui règne encore de nos jours.
Les 2 400 000 habitants du Bhoutan sont tous de bons et loyaux bouddhistes.
Les Mongols, fils spirituels du Tibet
Kubilaï Khan, petit fils de Gengis Khan (1214-1294) se convertit au bouddhisme tantrique tibétain;
mais la nouvelle religion se limita à la cour impériale jusqu'au XVIème siècle. A cette époque, le
lamaïsme tibétain connut un fort engouement avec l'arrivée sur le trône mongol d'Altan Khan.
Des moines mongols se rendirent à Lhassa pour étudier les textes sacrés.
En 1578, Sonam Gyatso, le chef des " Bonnets Jaunes " rendit visite à
Altan Khan qui l'aida à assurer son pouvoir sur le Tibet Central et lui
conféra le titre de Dalaï Lama ainsi qu'à ses prédécesseurs. Le bouddhisme
des " Bonnets Jaunes " devint la seule religion d'état et se propagea
rapidement dans le peuple.
La théorie tibétaine des moines réincarnés trouva toute sa place en
Mongolie. Zanazabar fut le premier lama réincarné : il se proclama " Chef
des bouddhistes de Mongolie " en 1641.
La Mongolie fut divisée en deux entités lorsque l'Empire Qing s'écroula et
qu'elle tenta de faire valoir son indépendance. Si le bouddhisme connut un
nouvel essor en Mongolie Extérieure à la chute de l'URSS, il n'en a pas été de même en Mongolie
Intérieure, où la Chine pratique depuis longtemps la même politique d'assimilation sournoise
qu'au Tibet : aujourd'hui, les neuf dixième de la population sont des Hans.
Le sangha de Mongolie, si l'on ne prend en compte que les seuls peuples mongols, compte un peu plus de 5 200 000
bouddhistes, soit 85% de la population.
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